Le salon Eurosatory, qui se tient à Paris et qui est le plus grand salon de l’armement au monde, offre une occasion unique de comprendre les équilibres et les évolutions du secteur de l’armement. Cette année, l’édition 2024 de l’événement met en lumière des systèmes tels que la lutte anti-drone ou le brouillage, qui sont de plus en plus présents sur le marché. Les drones, en particulier les drones suicides et à longue portée, sont également très en vogue. Rheinmetall, par exemple, présente sa tourelle Skyranger sur quatre véhicules différents, mettant en avant sa polyvalence.
En scrutant les stands et leurs emplacements, il est possible de dégager plusieurs tendances. Les stands les plus proches des entrées principales sont généralement ceux des entreprises ayant obtenu de bons résultats ou présentant de nouveaux produits innovants. Sig Sauer, l’un des plus grands fabricants d’armes au monde, expose les futurs fusils d’assaut et mitrailleuses légères de l’armée américaine, confirmant ainsi sa place de leader sur le marché.
La France détient une place spéciale dans le monde de l’armement en raison de son industrie holistique qui produit une gamme complète d’armements, allant du fusil d’assaut au porte-avions nucléaires. Cette approche découle de la vision gaullienne d’une France indépendante s’appuyant sur ses propres moyens. Cependant, la base industrielle et technologique de défense (BITD) française se concentre avant tout sur les besoins nationaux, en accord avec la doctrine et la géopolitique du pays, avant de songer à l’exportation.
Cette BITD française s’inscrit dans une logique davantage axée sur les besoins nationaux que commerciaux. Les systèmes les plus modernes, comme les véhicules Griffon, Serval et Jaguar, sont pensés selon une doctrine d’emploi française singulière, rendant leur exportation plus complexe. Contrairement à l’Allemagne, qui privilégie l’achat de matériel produit par sa BITD, la France développe ses armements en tenant compte de ses propres besoins.
L’état de la BITD française reste encore délicat, après des décennies difficiles marquées par des baisses de budgets conséquentes. Cette transformation l’a poussée à s’ouvrir davantage à l’export et à réduire sa dépendance vis-à-vis de l’État. Si le secteur naval et aérien a su bien s’adapter à ces changements, le secteur terrestre rencontre encore quelques difficultés. Malgré tout, la France se classe au deuxième rang mondial sur le marché de l’armement, grâce notamment au succès du Rafale.
La détention d’une base industrielle et technologique de défense revêt une importance capitale en termes de souveraineté. Un État doté de sa propre industrie de l’armement est en mesure de répondre à ses besoins en toute autonomie, sans dépendre de fournisseurs étrangers. Cette autonomie est d’autant plus cruciale dans un contexte géopolitique incertain, où la sécurité nationale est une priorité.
La stratégie du « bonzaï » d’armement adoptée par la France consiste à posséder une variété d’armements en petite quantité, pour pouvoir les développer en cas de nécessité. Cette approche, bien que risquée, s’appuie sur la possession de l’arme nucléaire comme garantie de sécurité. Les enseignements tirés des récents conflits au Haut-Karabagh, en Ukraine et à Gaza soulignent l’importance de maintenir une diversité de capacités militaires, allant des drones à l’artillerie et au fantassin.
En conclusion, la France affiche une position stratégique singulière dans le domaine de l’armement, basée sur une vision de souveraineté et d’indépendance. La BITD française, bien que traversant des périodes de transition, reste un acteur majeur sur la scène internationale, contribuant à maintenir l’autonomie stratégique du pays face aux défis actuels et futurs.