Quand un simple trajet devient un combat politique. La copropriété est exposée à tous les vents et les habitants souhaitent supprimer la servitude qui traverse la résidence du Moulin de Saquet, à Vitry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne (94), afin de la protéger. Nuisances sonores, vols, dégâts, trafic de drogue, prostitution mais aussi agression sexuelle d’une enfant de 8 ans et passage à tabac d’un adolescent dépouillé de son téléphone, de ses écouteurs, de ses baskets… Les méfaits commis en raison de cette servitude se multiplient, et les personnes âgées n’osent plus sortir de chez elles.
La mairie refuse pourtant de retirer cette servitude. Certaines personnes affirment que c’est pour des raisons politiques. « La raison pour laquelle le Maire ne veut pas nous donner satisfaction est que nous ne votons pas pour son parti (NDLR le maire est au PCF). Notre bureau de vote situé dans une école derrière la résidence regroupe essentiellement notre immeuble plus quelques pavillons, donc le maire est au courant de nos votes », affirme une résidente qui souhaite rester anonyme. La résidence compte 302 appartements et plus de 1000 habitants. La mairie de Vitry-sur-Seine n’a pas répondu aux sollicitations du Lesoir.
La servitude a été créée lors de la construction de la résidence en 1976. Juste derrière le terrain où se trouve la résidence, il existe un immeuble HLM et cette servitude a été installée pour permettre aux habitants de rejoindre la rue. À l’époque, seules quelques dizaines de personnes empruntaient la servitude. « Au fil du temps, il y a eu énormément de constructions, de nouveaux transports. La servitude est aujourd’hui empruntée chaque jour par plusieurs centaines d’usagers, parfois plus de 1000. Avec l’ouverture prochaine (en 2025) de la station de métro ligne 15-Vitry Centre, qui jouxte la résidence, environ 50,000 voyageurs par jour sont prévus », ajoute une habitante.
Certains copropriétaires ont tenté d’alerter la mairie qui n’a jamais accepté de les rencontrer, selon leurs dires, et n’a jamais répondu à leurs lettres. Ils ont donc fait appel à la justice. Lors d’une assemblée générale de copropriétaires, le lancement d’une procédure contre la mairie a été votée à plus de 96%, affirme une habitante. Le tribunal n’a toutefois pas supprimé la servitude, rappelant que « les servitudes cessent lorsque les choses se trouvent en tel état qu’on ne peut plus en user », d’après le Code civil. Cependant, la cour d’appel de Paris a reconnu, le 12 mars 2024, que la responsabilité de la commune était engagée car elle ne garantissait pas la sécurité des habitants. « Il appartient au maire d’une commune, qui dispose d’un pouvoir de police et d’une police municipale, d’assurer la tranquillité et la sécurité de ses administrés ».
Les habitants proposent de remplacer cette servitude par un autre chemin, dont une portion existe déjà. Le parc du Coteau dans lequel est construite (en souterrain) la future station de métro, connaît des travaux de réaménagement. « Il suffirait de créer un autre cheminement sur le domaine public, en prolongeant d’une dizaine de mètres supplémentaires le chemin déjà existant. Ce chemin pourrait facilement remplacer la servitude actuelle et cette création serait une solution peu coûteuse, qui satisferait tout le monde, d’après un avis d’architecte », affirme une habitante qui « n’ose imaginer la situation en 2025. De plus, nos appartements perdent de la valeur ». Elle affirme que la servitude actuelle n’est pas praticable par des personnes handicapées, la rampe est trop longue, trop pentue et ne respecte pas les normes de l’association APF France handicap. Affaire à suivre.