FOCUS – Éric Coquerel, le député insoumis, a été reconduit à la tête de la commission des finances, l’une des plus stratégiques du Palais Bourbon.
Parmi les huit commissions permanentes de l’Assemblée nationale, la commission des finances est sans aucun doute l’une des plus convoitées. La présidence de cette commission, détenue par l’opposition depuis 2007, revêt une importance stratégique particulière. Le député de La France insoumise (LFI), Éric Coquerel, a été réélu à sa tête ce samedi matin. Mais quels sont les pouvoirs du président de cette commission et quel est son rôle exact ?
Le principal rôle de la commission des finances est le contrôle du budget de l’État. Chaque année, avant sa discussion en séance plénière, elle examine le projet de loi de finances qui détaille l’ensemble des recettes et des dépenses pour l’année à venir. La commission vérifie également l’exécution de ce budget. À cet égard, elle peut effectuer des audits inopinés dans les ministères pour contrôler les dépenses. On parle alors de contrôle sur place et sur pièces. Récemment, la commission des finances du Sénat a réalisé un contrôle à Bercy pour comprendre les raisons de la détérioration du déficit de la France en 2023. La commission peut également convoquer toute personnalité impliquée dans les enjeux financiers du pays, que ce soit des ministres, des commissaires européens ou des dirigeants d’entreprises publiques.
Surtout, l’article 40 de la Constitution stipule que « les propositions et amendements émanant des parlementaires ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence une diminution des ressources publiques ou la création ou l’aggravation d’une charge publique ». Les parlementaires contournent souvent cette réglementation en ajoutant, par formalité, une taxe supplémentaire sur les alcools ou les tabacs à leurs propositions de loi ou amendements. Mais en fin de compte, c’est au président de la commission d’évaluer si les initiatives de ses collègues sont correctement financées.
En réalité, cela dépend de la manière dont chaque président interprète cette règle. Lors de la précédente législature, Éric Coquerel avait une interprétation plutôt souple de l’article 40, allant jusqu’à proposer son abrogation. Il n’avait pas soutenu la majorité présidentielle qui considérait qu’une proposition de loi visant à abroger la réforme des retraites, déposée par le groupe LIOT, était irrecevable au regard de cet article. Dans Le Monde, il avait déclaré que cette disposition créait une « inégalité entre l’exécutif, dont les projets de loi ne sont pas soumis à l’article 40, et le législatif, pour lequel c’est le cas ».
En 2007, sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy, la présidence de la commission des finances avait été attribuée à un membre de l’opposition. L’année suivante, cette pratique était devenue la norme, inscrite dans les règlements des deux Assemblées lors de la réforme constitutionnelle de 2008. Dans la législature actuelle, seul le camp présidentiel ne se considère pas comme faisant partie de l’opposition. Cependant, que se passerait-il si LFI obtenait un ou plusieurs postes ministériels dans le prochain gouvernement ? L’Assemblée se retrouverait dans une situation presque inédite, avec un président de la commission des finances issu d’un parti représenté au sein de l’exécutif.
Il existe cependant un précédent : Éric Woerth avait annoncé son ralliement à Emmanuel Macron en février 2022, alors qu’il avait été élu à la présidence de la commission en 2017 avec Les Républicains (LR). L’opposition avait alors demandé sa démission de son poste de président de la commission des finances, mais Éric Woerth était resté en fonctions jusqu’en juin 2022, à la fin de la XVe législature.