RENCONTRES SAUVAGES (1/5) – Au cœur de la province indonésienne de East Nusa Tenggara, un petit archipel d’îles entre Sumbawa et Florès, semblant être oublié de tous, se dressent des collines abritant des lézards redoutables. Pourtant, plonger sa tête sous l’eau de la mer de Florès suffit pour réaliser le contraire.
Depuis la plage de Gili Lawa Darat, un chemin escarpé grimpe une pente couverte d’herbes sèches. En 20 minutes, les plongeurs atteignent le sommet de la colline et découvrent leur prochain terrain de jeu : la côte indonésienne de Komodo, parsemée d’îlots, de criques turquoise et de détroits indigo. En contrebas, dans une baie paisible, un phinisi – le bateau traditionnel des marins Bugis – attend sagement d’être libéré pour une prochaine aventure sur les eaux agitées de la mer de Florès.
Avec ses deux mâts surmontés de vergues, ses haubans de bateau pirate et sa longue poupe élégante, la goélette a belle allure. Une fois les plongeurs de retour à bord, les marins lèvent l’ancre sans tarder.
Pas de courant, pas de poissons !
Direction Castle Rock, un sec en forme de cône écrasé au nord de Gili Lawa Laut, réputé pour ses bancs de poissons abondants et ses courants forts. « No current, no fish » disent les divemasters expérimentés. Et il y a du courant. La région, ouverture entre l’Océan Indien et l’Indo-Pacifique, est soumise aux humeurs de l’un des plus grands mouvements d’eau de la planète. Tout dépend de la lune et des marées.
Ce matin, les fonds de Castle Rock sont calmes comme un lac alpin. De vastes bancs de poissons se déplacent gracieusement. De temps en temps, des carangues à grosse tête ou des thazards viennent perturber cette mécanique silencieuse. À 25 mètres de profondeur, une femelle requin-gris surgit du bleu, observe avec fermeté avant de retourner dans l’ombre. Après des années de surpêche, les poissons, et les requins en particulier, bénéficient de la protection du Parc National créé autour de Komodo et Rinca en 1980.
Lézards venimeux
En mer, les paysages d’îles dénudées sont dominés par quelques arbres résistants. Faute de voiles déployées, qui sont généralement utilisées pour les longues traversées, la brise gonfle les serviettes accrochées aux bastingages et aux haubans. Dans la baie de Loh Liang, de longues plages dorées accueillent des troupeaux de biches.
Il faudra attendre d’atteindre le camp de Loh Buaya sur l’île de Rinca pour rencontrer les fameux dragons de Komodo, les plus grands lézards carnivores du monde. Ils sont environ 5700 répartis sur les îles de Komodo, Rinca et Florès. Ces créatures chassent notamment les cervidés, les cochons sauvages et même les buffles en cas de grande faim. Une simple morsure et les bactéries présentes dans leur salive font le reste, provoquant la mort de leur proie par septicémie.
Face au dragon
Bien que leur régime alimentaire soit principalement carnivore, ces lézards peuvent également attaquer des humains. L’un des premiers occidentaux à en faire les frais était un Suisse, le baron Rudolf von Reding Biberegg, qui se blessa au genou lors d’une randonnée en 1974. Se retrouvant seul pendant que le guide cherchait des secours, on ne retrouva de lui qu’un appareil photo et une chaussure. Malgré leurs petites pattes, les dragons de Komodo sont de redoutables sprinters.
Le guide, armé d’un simple bâton, mène son groupe de touristes à travers un bush parsemé de kapoquiers et de palmiers rônier. Des bruits de branches cassées. Des froissements de feuilles. Il ne s’agit que d’un couple de méga-podes, d’étranges pintades aux pattes orange. Après une heure de marche, le groupe arrive enfin face à cinq dragons se prélassant paisiblement au bord d’un ruisseau ensoleillé. On serait presque tenté de se joindre à eux. Non loin, des buffles prennent un bain de boue, lançant des regards méfiants à leurs voisins de spa.
Carnet pratique
Quelle est la meilleure période ?
La saison sèche, propice à la plongée, va de fin mars à novembre. De décembre à mars, le climat est plus agité, avec des pluies abondantes et des vents violents. Malgré tout, des averses peuvent survenir même en saison sèche, mais elles sont généralement de courte durée et surviennent en fin de journée.
Les plongées à Komodo
Les plongées dans le nord de l’archipel se déroulent dans des eaux claires et chaudes (27-28°C) de la mer de Florès. Il s’agit d’une diversité de sites allant de dérivantes paisibles à agitées (selon les marées et la configuration du site) au-dessus de secs, le long de murs, de pentes récifales ou dans des passes. Dans le sud, au-delà de l’île de Padar, l’eau se refroidit considérablement (23-24°C) et la visibilité est réduite à quelques mètres en raison de phénomènes d’upwellings en provenance de l’Océan Indien. Malgré l’absence de pélagiques, la vie du récif est très dense, offrant de nombreuses occasions de photographie macro. Torpedo Bay est le principal site de « muck dive » dans le sud.
Niveau de plongée
Les courants entre les îles peuvent être très forts, il est recommandé d’avoir un niveau 2.
Avec qui partir
Liveaboard, spécialiste des croisières plongée, propose plusieurs navires à partir de 289 €/jour. www.liveaboard.com