La réalisatrice canadienne-russe Anastasia Trofimova a suscité la controverse en présentant son documentaire « Russes à la guerre » lors du Festival du film de Venise. Ayant passé plusieurs mois au sein d’un bataillon russe sur le front ukrainien, elle a recueilli les témoignages des soldats pour en faire un film de plus de deux heures. Prévue pour être projetée pour la première fois en Amérique du Nord au Festival de Toronto, « Russians at War » a été soudainement mis en pause suite à des menaces jugées significatives pour la sécurité du public.
Les accusations de « propagande russe » ont fusé de toutes parts, aussi bien à Venise qu’à Toronto. Des personnalités politiques et culturelles ukrainiennes ont vivement critiqué le film, dénonçant une représentation biaisée du conflit en cours. La vice-première ministre du Canada, Chrystia Freeland, a souligné l’importance de ne pas donner une plateforme à des discours qui pourraient manipuler l’opinion publique. De son côté, l’Agence d’État ukrainienne pour le cinéma a demandé l’annulation des projections, qualifiant le documentaire d’outil dangereux de manipulation.
Anastasia Trofimova s’est défendue en affirmant que son film était en réalité un plaidoyer contre la guerre, mettant en lumière le quotidien difficile des soldats et les conséquences dévastatrices du conflit. Les images montrent des hommes désorientés, cherchant à survivre avec des moyens limités et un équipement obsolète. Entre cigarettes et verres d’alcool, ils tentent d’oublier la brutalité de la guerre et les pertes humaines auxquelles ils sont confrontés.
La décision de suspendre les projections a été douloureusement ressentie par le producteur du film, Sean Farnel, qui y voit une concession à la haine et à la violence. Il dénonce la pression exercée par certains responsables politiques et estime que la liberté d’expression est mise à mal dans ce contexte. Malgré les critiques et les controverses, Anastasia Trofimova reste convaincue de l’importance de son travail et espère pouvoir partager son message avec le public dans un avenir proche.
Pour l’instant, « Russians at War » reste dans l’attente d’une nouvelle date de projection, dans un climat de tension et de polarisation exacerbée. Les réactions passionnées qu’il suscite soulignent les enjeux complexes liés à la représentation des conflits armés et à la liberté artistique. Face à la censure et aux pressions, la cinéaste se bat pour faire entendre la voix de ceux qui vivent au quotidien les horreurs de la guerre, dans l’espoir de sensibiliser le public à la réalité brutale de ces conflits.