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Face aux découvertes de sites archéologiques vieux de près de deux millénaires qui se multiplient de plus en plus, la mairie de l’île d’Yeu a décidé il y a environ quinze ans de faire appel à une archéologue pour les étudier. Avec le temps, le phénomène s’intensifie.
Dans un coffre en pierre, le squelette est en position fœtale, tourné vers la mer. Datant d’environ 1600 ans av. J.-C., il repose au fond d’un monument funéraire mis au jour cet hiver sur l’île d’Yeu par l’érosion et les tempêtes. Construit en pierre, large de quatre mètres et bordé de maçonnerie, le monument était jusqu’à présent recouvert de sable et de quelques buissons. Mais les tempêtes de l’hiver ont attaqué la dune et arraché une partie du tombeau. En février, un promeneur a aperçu un crâne dépasser du monticule. «Nous nous attendions à trouver un squelette sur une tombe, mais il s’agit en fait d’un véritable monument funéraire, abritant plusieurs individus», explique Annabelle Chauviteau, responsable du service patrimoine à la mairie de l’île d’Yeu, truelle à la main.
En creusant autour du coffre de pierre, les archéologues ont découvert une deuxième tombe, quatre autres crânes et de nombreux os, en bon état de conservation. Accroupi, utilisant un fin crochet similaire à celui d’un dentiste, Yannick Prouin dégage progressivement les os avant de les placer dans des sachets transparents. L’archéo-anthropologue les étudiera et les datera en laboratoire une fois les fouilles terminées. Cette année, pas moins de quatre sites archéologiques ont été mis au jour sur l’île d’Yeu, à cause des tempêtes hivernales et de l’érosion. Il y a eu le cimetière des naufragés, où 19 tombes médiévales ont été découvertes. Puis un site présumé gaulois, où un festin aurait eu lieu: des restes de moules, poissons et viandes ont été trouvés. À proximité, de petits menhirs ont été datés de la période néolithique.
Confrontée à la multiplication des sites archéologiques, la mairie a décidé il y a près de quinze ans de recruter une archéologue pour assurer la surveillance des côtes et intervenir au plus vite: l’océan peut emporter os et objets aussi rapidement qu’il les dévoile. Annabelle Chauviteau s’est entourée d’un réseau de riverains et de promeneurs prêts à la prévenir en cas de nouvelle découverte. «Ces sites apparaissent au gré des tempêtes, de plus en plus violentes et fréquentes, et de l’érosion qui s’est accentuée ces dernières années», explique l’archéologue. Sur la face nord-est de l’île d’Yeu, basse sur l’océan et bordée de plages, le dérèglement climatique et la montée du niveau de la mer accentuent le risque d’érosion et de submersion. Sur la plage de la Petite conche, les vagues engloutissent certaines années plusieurs mètres de sable.
Un projet scientifique collaboratif a été lancé en 2018 pour suivre le recul du trait de côte et envisager des outils de lutte contre la submersion marine, qui menace plusieurs maisons. Dirigé par l’université de Nantes, le projet se nourrit en partie des photos et témoignages des habitants locaux. «Les fouilles archéologiques nous aident également à comprendre l’évolution du littoral à travers les époques et à mettre en perspective les phénomènes actuels», explique Agnès Baltzer, co-responsable du projet ODySéYeu.
Afin de ne pas perturber les plages et d’aggraver l’érosion, les sites archéologiques doivent être restaurés une fois les fouilles terminées. Sur la pointe de Gilberge, la dune sera reconstituée et le monument funéraire millénaire à nouveau enfoui. Les squelettes, quant à eux, rejoindront après étude le dépôt archéologique de Port-Joinville, au nord de l’île. À l’abri des tempêtes.
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