Le président français Emmanuel Macron a fait une déclaration marquante ce vendredi, en reconnaissant pour la première fois que Larbi Ben M’hidi, une figure emblématique du Front de libération nationale (FLN), a été « assassiné par des militaires français ». Ces mots, prononcés lors d’une commémoration marquant le 70e anniversaire de l’insurrection du 1er novembre 1954 – un événement clé qui a déclenché la guerre d’Algérie – soulèvent des questions profondes sur la mémoire collective et les relations entre la France et l’Algérie, toujours empreintes de tensions historiques.
Larbi Ben M’hidi, militant ardent pour l’indépendance de l’Algérie, est devenu un symbole de la résistance contre la colonisation française. L’authenticité de son engagement et la brutalité de son assassinat en 1957 a laissé une cicatrice dans l’histoire algérienne, mais également dans la conscience collective française. En admettant ce fait historique, le président Macron ne se contente pas seulement d’un acte symbolique. Il ouvre la voie à un dialogue renouvelé sur les conséquences tragiques de la colonisation française en Algérie.
Fabrice Riceputi, historien et expert sur les questions coloniales et postcoloniales en France, souligne que cette reconnaissance pourrait être un tournant dans la mémoire nationale. « C’est un acte qui pourrait contribuer à la réconciliation des mémoires, tant du côté algérien que du côté français », déclare-t-il. À travers cette prise de position, Macron reconnaît le besoin de confronter le passé colonial de la France. Un passé qui, jusqu’à présent, a souvent été entouré de silences et de dénis.
L’anniversaire du 1er novembre est, pour beaucoup, l’occasion de se souvenir de ceux qui ont sacrifié leur vie pour l’indépendance de l’Algérie, mais il est également un moment de réflexion sur les atrocités commises pendant cette guerre, qui a duré de 1954 à 1962. La violence, les tortures et les disparitions sont encore des sujets tabous dans le discours public français. Le fait que Macron reconnaisse l’assassinat de Ben M’hidi pourrait encourager d’autres à parler et à reconnaître ces événements tragiques.
Macron a également évoqué l’importance de la mémoire et du devoir de vérité dans ses remarques, soulignant que le passé doit être abordé pour construire un avenir meilleur. Cette déclaration est d’autant plus significative dans le contexte contemporain, où les questions de racisme, de colonialisme et de mémoire historique sont de plus en plus présentes dans le débat public. Beaucoup estiment qu’une prise de conscience et une démarche sincère vers la reconnaissance des erreurs du passé peuvent servir de base à une meilleure compréhension mutuelle.
Cependant, cette décision ne fait pas que susciter des espoirs d’apaisement. Elle pourrait aussi entraîner des réactions mitigées. De nombreux Algériens, en particulier ceux qui ont vécu la guerre ou qui en ont entendu les récits douloureux, pourraient voir cette déclaration comme une trop petite avancée par rapport à l’ampleur des souffrances vécues. D’autres, en France, peuvent craindre que cette reconnaissance ne soit perçue comme une remise en question de la légitimité des actions militaires françaises.
La commémoration du 1er novembre 1954 doit, selon Riceputi, être une occasion de dialogue, pas seulement entre les nations, mais également entre les générations. « Il est essentiel d’intégrer cette histoire, non pas pour légitimer des ressentiments, mais pour favoriser une conscience historique qui nous permette d’avancer », affirme-t-il.
En cette journée de commémoration, la volonté de Emmanuel Macron d’ouvrir la voie à une réflexion sur le passé colonial de la France semble être une invitation à revisiter ce chapitre douloureux de l’histoire. La reconnaissance de l’assassinat de Larbi Ben M’hidi marque possiblement le début d’une ère où le discours sur la mémoire, le colonialisme et la réconciliation pourrait devenir une priorité non seulement sur le plan politique, mais également dans le cœur et l’esprit des citoyens des deux pays.