Pour renflouer les caisses de l’État, le projet de loi de finances envisage de mettre à contribution les entreprises avec une « surtaxe » temporaire. Est-ce vraiment nécessaire ?
Alors que le projet de loi de finances pour 2025 est débattu au Parlement, les incertitudes budgétaires demeurent nombreuses. Cependant, il est déjà clair que nous devons dire adieu à une tendance récente de la fiscalité française : la baisse de l’impôt sur les sociétés (IS), dont le taux est passé, entre 2017 et 2022, de 33,3% à 25% des bénéfices. À titre anecdotique, il s’agit de la moitié du tout premier taux (50%) fixé à la création de cet impôt en 1948. Par la suite, il a été progressivement réduit à environ 33% au début des années 1990, avant une nouvelle baisse qui vient de toucher à sa fin.
Le projet de loi de finances prévoit que les entreprises assujetties à l’IS, dont le chiffre d’affaires se situe entre 1 et 3 milliards d’euros, verront ce taux augmenter à 30,1% en 2024, puis à 27,6% en 2025 avant de revenir à la normale. Pour les plus grandes entreprises, telles que celles du CAC 40, les taux seraient respectivement de 35,3% puis de 30,1%.
Ce n’est pas tout : de manière permanente cette fois, les rachats d’actions des entreprises avec un chiffre d’affaires supérieur à un milliard d’euros seraient taxés à hauteur d’environ 8%.
Augmenter le coût du capital…
Il est important de rappeler que en augmentant le coût du capital, l’augmentation des impôts réduit la rentabilité des entreprises et peut potentiellement peser sur leurs investissements. Les actionnaires seront donc les premiers pénalisés par ces mesures, puisque la Bourse valorise principalement les bénéfices visés. Les distributions de dividendes pourraient également en pâtir. De plus, l’augmentation du prélèvement forfaitaire unique (PFU) impactera davantage les plus-values et les coupons des actionnaires, en dehors du plan d’épargne en actions (PEA). Enfin, les rachats d’actions, comme les dividendes, qui avaient atteint un record en 2023, seront également touchés. Toutes ces mesures, au passage, épargneront les créanciers, concurrents naturels des actionnaires dans le financement des entreprises.
… c’est affaiblir la Bourse
Nos lecteurs le savent bien : Le Lesoir Patrimoine et Bourse ne fait pas de politique. Cependant, nous devons suivre de près les anticipations des bénéfices, qui sont à la base des cours de Bourse. Le retour de l’instabilité fiscale, symbolisé par ces impôts alourdis, constitue une mauvaise nouvelle. Si les surtaxes d’IS sont réellement temporaires, les dégâts seront limités. Cependant, étant donné qu’elles sont conçues pour rapporter 8 milliards d’euros la première année (et 4 milliards la seconde), alors que le déficit public de 2024 devrait dépasser 160 milliards d’euros, nous craignons que ces mesures « provisoires » ne soient amenées à perdurer.