Cette semaine en Algérie, l’art et la mémoire se sont entremêlés à l’occasion de la commémoration du 70e anniversaire du déclenchement de la guerre d’indépendance, marquée par une comédie musicale unique en son genre. Intitulée « Le prix de la liberté », cette œuvre a été interprétée pour la première fois jeudi à l’Opéra d’Alger, captivant un public venu en masse pour rendre hommage à la contribution des artistes à la lutte pour l’indépendance face à l’occupation française.
Le 1er novembre, Algérie a marqué solennellement le début de cette insurrection qui a duré jusqu’en 1962 par un imposant défilé militaire, un événement qui a également ouvert la voie à une série de manifestations culturelles célébrant l’héritage et les sacrifices de ceux qui ont contribué à la cause nationale. Pour les concepteurs de la comédie musicale, cette représentation est une manière innovante de mettre en lumière ces figures artistiques qui, à travers leur engagement, ont su faire entendre la voix de l’Algérie même au-delà de ses frontières.
Haroun Al Kilani, l’auteur du livret de la pièce, insiste sur le fait que « Le prix de la liberté » représente un hommage vibrant aux artistes qui ont pris de grands risques pour se joindre au Front de Libération Nationale (FLN). « C’est un moyen de rappeler aux nouvelles générations le rôle essentiel et les sacrifices de ceux qui ont donné leur vie pour leur pays », souligne-t-il.
Le spectacle réunit près de 200 artistes et se compose de quatre actes, mettant particulièrement en avant la création de l’hymne national « Kassaman ». Écrit par le poète Moufdi Zakaria, cet hymne symbolise l’âme et l’unité de la nation algérienne. Le metteur en scène, Rabie Guechi, âgé de 52 ans, exprime combien il était crucial de rendre hommage à ces « artistes-soldats » qui ont façonné l’histoire de l’Algérie avec leur talent et leur courage.
La comédienne Meriem Lechlech, qui ne compte que 23 ans, se dit émue par l’ampleur de cette réalisation, décrivant le spectacle comme épique. « Il montre comment les artistes ont été des acteurs clés dans le développement de la Révolution », explique-t-elle avec passion. Avec une durée d’une heure vingt, la représentation mélange habilement plusieurs arts – chant, musique, danse, théâtre, vidéo et animation – ce qui permet d’atteindre un large public et de transmettre le message de manière attractive.
Pour certains spectateurs, comme Mohamed Zelagui, 27 ans, la portée de cette œuvre dépasse le cadre de la performance théâtrale. « Les réalisations des artistes resteront gravées dans l’âme de notre société et seront transmises aux générations futures. C’est essentiel de rappeler d’où nous venons », déclare-t-il, plein d’enthousiasme.
Le 1er novembre reste une date emblématique pour l’Algérie, commémorée par des rituels de mémoire, notamment un défilé militaire de deux heures et demie, rappelant la nuit de 1954 où une trentaine d’attentats perpétrés par le FLN ont marqué le début d’un conflit qui aura coûté la vie à plus d’un million et demi d’Algériens, selon les chiffres officiels. Cette guerre a longtemps laissé des cicatrices dans le tissu social du pays.
Les relations entre l’Algérie et la France connaissent des hauts et des bas, naviguant entre nostalgie et tensions. La récente position de Paris, apportant son soutien au Maroc sur la question du Sahara occidental, a attisé la colère d’Alger, exacerbant des désaccords historiques profondément enracinés. En cette période de commémoration, ces enjeux politiques rappellent à quel point le passé continue de façonner les relations présentes.
Ainsi, « Le prix de la liberté » ne se contente pas d’être une comédie musicale, mais agit comme un puissant rappel de la richesse culturelle et historique de l’Algérie, tout en soulignant le rôle inébranlable des artistes dans la lutte pour la liberté.