REPORTAGE – La présence du président américain, un tournant dans les relations entre Copenhague et le Groenland
Au bord de la mer glacée, la capitale du Groenland, Nuuk, abrite une histoire politique tumultueuse. Les petites maisons de la ville, dispersées comme un jeu de Lego dans la neige, sont comme des témoins silencieux de l’adaptation et de la résilience des Inuits face aux conditions climatiques extrêmes de l’Arctique.
Située sur un cap qui domine les fjords sombres, Nuuk est entourée de montagnes glacées qui dominent la côte ouest de l’une des terres les plus vastes et les moins peuplées du monde. Sous le ciel gris, comme un cuirassé, la ville offre un panorama unique, avec le Musée national comme point de référence. Celui-ci expose des kayaks, des vêtements de peau et des harpons, symboles de l’adaptation extraordinaire des Inuits à un climat qui les a éternellement façonnés.
Au sommet d’un promontoire rocheux, la statue de granit de Hans Egede, le missionnaire fondateur de la colonie du Groenland, se dresse comme un géant. C’est lui qui a apporté au XVIIIe siècle le christianisme, les maisons en bois et l’administration danoise à la petite colonie fondée par le Danemark. À ses pieds, les bâtiments scandinaves de l’ancienne Godthab, la capitale de la colonie, sont peints selon le code couleur en vigueur, avec les églises et les magasins en rouge, les hôpitaux en jaune, les écoles en vert et les pêcheurs en bleu.
La petite cathédrale en bois du Sauveur, construite au XIXe siècle, est toujours debout, avec des maquettes de trois-mâts suspendues sous le plafond et les numéros des Psaumes affichés aux murs. Le pasteur est une femme, qui porte avec sa soutane verte la fraise de dentelle des luthériens. L’office est célébré en kalaallisut, la principale langue groenlandaise.
Malgré l’héritage danois, la ville moderne de Nuuk s’est éloignée de sa capitale. Les barres d’immeubles, les centres commerciaux aux façades de verre et les supermarchés aux enseignes brillantes dans la nuit arctique ont fait place à un développement économique plus indépendant. La croix blanche sur fond rouge du drapeau danois flotte encore devant les édifices publics, mais il est chaque fois accompagné des couleurs du Groenland, disque rouge et blanc coupant deux bandes blanches et rouges. Le drapeau est hissé en haut des mâts, pendu aux balcons des immeubles ou posé sur les comptoirs des magasins, symbolisant l’autonomie politique des Inuits et le grand réveil des peuples de l’Arctique qui reprennent peu à peu le contrôle de leur destin.
La présence du président américain à Nuuk a déjà modifié les rapports parfois tendus entre Copenhague et son ancienne colonie. Les échanges économiques et culturels ont augmenté, et la communauté internationale a mis en avant les enjeux climatiques et les perspectives de développement durable de l’Arctique. Mais le Groenland demeure un pays souverain, qui poursuit sa route d’autonomie et de souveraineté, sans se laisser influencer par les intérêts des puissances étrangères.
Il est donc urgent que les décideurs et les acteurs internationaux prennent en compte les revendications des Inuits et des peuples de l’Arctique, pour permettre une gestion durable et responsable de leurs ressources naturelles et de leur territoire. La présence du président américain à Nuuk est un tournant dans les relations entre Copenhague et le Groenland, et il est temps que les gouvernements et les acteurs internationaux se mettent d’accord pour promouvoir un développement durable et respectueux des peuples et des territoires de l’Arctique.