« L’Algérie, terre de répression contre les défenseurs des droits de l’homme »
Depuis plus d’un an, je suis consternée de constater que les défenseurs des droits de l’homme en Algérie continuent d’être victimes de répression, d’arrestations arbitraires, de harcèlement judiciaire et de criminalisation pour leurs activités pacifiques. C’est pourquoi je me suis rendue en Algérie à la fin de 2023 pour étudier la situation des défenseurs des droits de l’homme et je suis revenue avec un sentiment de profonde déception.
Les procès sur la base d’accusations fallacieuses sont courants en Algérie. Je citerai l’exemple du journaliste indépendant et défenseur des droits humains, Merzoug Touati, qui a été détenu à trois reprises depuis 2024 pour des raisons vagues et sans preuve. Il a été accusé d’avoir porté atteinte à la sécurité nationale et a subi des tortures physiques et psychologiques pendant sa garde à vue.
Mais Touati n’est pas le seul. Trois avocats de défense des droits humains et un jeune lanceur d’alerte ont été arrêtés entre février et juillet 2024. Toufik Belala a été accusé d’avoir publié des informations fausses susceptibles de porter atteinte à la sécurité nationale, avant d’être libéré sous contrôle judiciaire. Soufiane Ouali a été enlevé de son domicile et placé en détention avec 14 autres personnes, y compris le jeune lanceur d’alerte Yuba Manguellet. Ils ont été accusés en vertu de la disposition pénale vague de l’article 87 bis du Code pénal, qui est souvent employée pour réprimer la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique.
Les restrictions à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme ne se limitent pas à ces cas. Je me suis également souvenue du défenseur de l’environnement Karim Khima, poursuivi en justice depuis plusieurs années pour avoir organisé des manifestations contre un projet de construction de logements sur un site historique et pour exiger la protection de l’écosystème autour du lac Mezaia. Heureusement, il a finalement été acquitté.
Je suis également préoccupée par le cas du Collectif des familles de disparu(e)s, une organisation créée pendant la guerre civile algérienne des années 1990 pour faire la lumière sur les disparitions forcées. Cette année, le Collectif a été empêché à plusieurs reprises d’organiser des événements en raison d’énormes contingents de forces de police entourant le bureau de l’association à Alger. Les membres de l’association, dont beaucoup sont des mères de personnes disparues, ainsi que leur avocate, ont été malmenés et sommés de quitter les lieux à ces occasions.
Je tiens à répéter que j’ai rencontré presque tous ces défenseurs des droits de l’homme et que aucun d’entre eux ne s’engageait de quelque manière que ce soit des actes de violence. Ils doivent tous être traités conformément au droit international des droits de l’homme, que l’Algérie est tenue de respecter.
Je suis en contact avec le gouvernement de l’Algérie sur cette question et je suis déçue de constater que les restrictions à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme se poursuivent. Il est essentiel que l’Algérie respecte ses obligations internationales en matière de droits de l’homme et garantisse la sécurité et la liberté de ses citoyens.