La bataille pour la gouvernance des chambres d’agriculture française a épousseté un tournant avec les récentes élections. Si l’alliance FNSEA-JA conserve toujours le leadership, elle voit sa suprématie menacée par la Coordination Rurale (CR) qui réalise une percée historique, voire émouvante pour certains. Avec 30% des voix au total, la CR devient la deuxième force syndicale du pays, loin derrière l’alliance FNSEA-JA qui conserve cependant la majorité avec 48, 5% des suffrages.
Ces changements sont palpables, notamment dans les régions les plus affectées par les crises agricoles et les négociations sur les accords de libre-échange. La CR, qui a fini par prendre ses quartiers là où les producteurs agricoles se sentent les plus abandonnés, comme en Gironde ou en Lot-et-Garonne, a réussi à incarner ce sentiment de frustration et de protestation. « Nous avons atteint, voire dépassé nos objectifs, se félicite Christian Convers, secrétaire général de la CR. Nous progressons partout de 10 à 15% des voix. Nous pourrions même gagner une région, la Nouvelle-Aquitaine. Les agriculteurs se sont rendus compte qu’il n’était pas bon de confier les intérêts de l’agriculture française au même syndicat depuis plus d’un demi-siècle ».
Malheureusement, pour l’alliance FNSEA-JA, les résultats sont décevants, bien que le niveau de participation soit encore fort. « Nous remercions les agriculteurs mobilisés en nombre lors de ces élections avec un niveau de participation qui n’a pas baissé », commente Arnaud Rousseau, leader de la FNSEA. « Nous prenons acte de la perte d’une quinzaine de chambres et assurons nos vœux pleins et entiers aux nouvelles équipes. FNSEA et JA Restent la première force syndicale dans 80% des 83 chambres dont les résultats sont définitifs. Ce soir, une colère s’est exprimée sur les promesses non tenues par le gouvernement. Nous avions identifié les départements qui pouvaient basculer. Nous avons été surpris pour la Lozère, la Charente-Maritime, les Ardennes et des départements du Centre Val de Loire ».
La performance de la Confédération paysanne est pour le moins décevante, ne remportant qu’une seule chambre en Ardèche. Son positionnement trop radical sur les bassines aux côtés de pseudos défenseurs de l’environnement qui détruisent les cultures d’autres agriculteurs a été mal perçu par le milieu agricole. « Son positionnement trop radical a été mal perçu par le milieu agricole, constate Laurence Marandola, directrice de la Confédération paysanne en Ariège. Elle comptait remporter une dizaine de chambres. On est loin du compte ».
Dans la foulée, le phénomène émergent du leader de la CR, Jérôme Bayle, a réussi à s’imposer en Haute-Garonne avec une liste de 41,06% des voix. « En créant cette liste, les paysans ont voulu reprendre leur destin en main face à l’état-major de nos syndicats qui semblent ignorer la grande difficulté économique et morale dans laquelle nous nous trouvons », commente-t-il au Lesoir.
La bataille pour la gouvernance des chambres d’agriculture française est loin d’être terminée. Les recours sont àAMP; pour, et la crise agricole n’est pas résolue. Mais l’heure est venue pour les producteurs agricoles de se réorganiser et de trouver des solutions concrets pour les mettre à l’abri des menaces qui les environnent.