La Disparition d’un Géant de Hollywood : Gene Hackman
À la veille de la cérémonie des Oscars, où il avait été récompensé à deux reprises, le monde du cinéma est en deuil. L’acteur américain Gene Hackman, connu pour ses rôles de dur à cuire et de personnages complexes, est décédé à l’âge de 95 ans. Son épouse, Betsy Arakawa, 63 ans, a également été retrouvée morte à leur domicile à Santa Fe, dans l’après-midi du 26 février. Le shérif du comté de Santa Fe, Adan Mendoza, a confirmé la nouvelle, qui a été rapportée par plusieurs médias américains, dont Variety.
La cause et l’heure exacte des décès n’ont pas été communiquées, mais la piste criminelle n’est pas envisagée, selon le shérif du comté de Santa Fe. « Nous sommes au milieu d’une enquête préliminaire sur un décès, en attente de l’approbation d’un mandat de perquisition », a déclaré le shérif au Santa Fe New Mexican. Le couple avait un chien, qui a également été retrouvé mort.
Gene Hackman était un acteur à la personnalité complexe, qui avait construit sa réputation sur des rôles de dur à cuire et de personnages irascibles. Dans les dernières années de sa vie, il se définissait lui-même comme « un casse-couilles quatre étoiles » et caricaturait son personnage de dur à cuire. « Je plains les metteurs en scène qui travaillent avec moi », confiait-il. Clint Eastwood, qui l’avait dirigé dans le film Impitoyable, le voyait comme « un arbre puissant et indéracinable mais au feuillage fragile ».
La carrière de Gene Hackman avait débuté dans les années 1960, avec des rôles mineurs dans des films tels que Lilith et Bonnie and Clyde. Mais c’est avec le film French Connection, réalisé par William Friedkin en 1971, que sa carrière a pris son envol. Il y jouait le rôle de Popeye, un flic brutal et corrosif, qui lui a valu son premier Oscar. Son second Oscar, il l’a obtenu en 1992 pour son rôle de shérif brutal dans le film Impitoyable, réalisé par Clint Eastwood.
Gene Hackman devait beaucoup à William Friedkin, qui l’avait pris à contrecœur sur French Connection. « Ce n’était ni mon premier, ni mon deuxième, ni même mon dixième choix », a raconté Friedkin. « Très clairement, je n’en voulais pas, il était beaucoup trop tendre pour le rôle. Mais on a fini par se rendre à l’évidence : nous n’avions tout simplement personne d’autre. Et aujourd’hui, je suis incapable d’imaginer le film sans lui, il est parfait. » Sur le tournage, la relation entre les deux hommes était électrique. Dès le premier jour, Gene Hackman voulait jeter l’éponge. « Il a fallu plus de vingt prises pour qu’il parvienne à gifler un dealer », se souvient le réalisateur. « Là, je me suis dit qu’on était vraiment dans la merde. Hackman est contre la violence, il déteste ça, et il se croyait incapable de jouer un rôle pareil. »
La vocation d’acteur de Gene Hackman était née très tôt, non pas en Californie où il est né, mais à Danville, une bourgade à 100 kilomètres au sud de Chicago. Son père, rédacteur du Commercial News, l’avait abandonné à 13 ans, en 1943. Le gamin jouait dans la rue ; son père au volant de sa voiture lui faisait un salut de la main avant de disparaître. « Je suis peut-être devenu acteur à cause de ce geste de mon père », a raconté Hackman. « Il était si… précis. Je n’avais pas besoin d’autre chose pour comprendre ce qu’est un acteur. »
Gene Hackman a ensuite rejoint les Marines à 16 ans pour voir du pays. Pendant six ans, il a sillonné l’Asie : Shanghai, Yokohama, les Philippines. Il a goûté à l’alcool, aux bagarres, aux filles et à la radio de l’armée. De retour aux États-Unis, il s’est cherché encore. Radio, peinture, ou écriture, il papillonnait. En Californie, il a pris des cours dans un théâtre de Pasadena avec un gringalet nommé Dustin Hoffman. « On nous a prédit que nous étions ceux qui avaient le moins de chance de réussir », a raconté Hackman. « À l’époque, ça n’allait pas du tout. Je n’avais pas le genre de physique qu’on recherchait et je n’avais aucune confiance en moi. Je multipliais les petits rôles, j’enchaînais les petits boulots… et j’en arrivais à me demander pourquoi j’avais décidé d’être acteur. »
La carrière de Gene Hackman a ensuite pris son envol, avec des rôles dans des films tels que Bonnie and Clyde, L’Épouvantail et Conversation secrète. Il a joué des personnages étranges, ni noirs ni blancs, et a obtenu deux Oscars pour ses performances. Mais il a également connu des échecs commerciaux, qui l’ont fait douter de son talent. « J’ai été très touché par le fait que personne n’aille voir ces films dans lesquels je m’étais tant investi », a confié Hackman. « J’ai perdu toute confiance à faire des choix. Et d’une certaine façon, j’ai abandonné. J’ai considéré cette activité comme un simple travail. J’ai recommencé à m’en remettre à ce qu’on me proposait. »
Gene Hackman a pris sa retraite anticipée dans les années 1980, mais est revenu sur les écrans dans les années 1990, avec des rôles dans des films tels que La Firme, Mort ou vif et USS Alabama. Il a également produit et interprété le film Under Suspicion, une adaptation de Garde à vue, de Claude Miller. En 2001, il a joué dans le film La Famille Tenenbaum, de Wes Anderson, où il a interprété le rôle de Royal, un chef de famille égoïste et manipulateur.
Gene Hackman a joué presque tout au cours de sa carrière, par passion, pour la gloire ou pour l’argent. « Je ne regrette aucun des films que j’ai tournés », a confié Hackman. « Même ceux qui n’ont pas bien marché. J’en ai fait un certain nombre parce que l’acteur initialement choisi s’était désisté. Vu la qualité de la concurrence à Hollywood, je m’estime encore heureux d’avoir été choisi en seconde position. » Au fond, Gene Hackman n’était pas si ingrat avec ce métier, auquel il a donné beaucoup et qui lui a beaucoup rendu.
La disparition de Gene Hackman est une perte pour le monde du cinéma, qui perd un de ses plus grands acteurs. Mais son héritage est immense, et ses films continueront à inspirer les générations futures. Comme l’a dit Clint Eastwood, « il était un arbre puissant et indéracinable mais au feuillage fragile ». Mais c’est justement cette fragilité qui a fait de lui un acteur si complexe et si fascinant.