La Liberté d’expression en danger en Algérie : le cas emblématique d’Ihsane El Kadi
Le 29 août dernier, un événement a secoué le monde de la presse et des droits de l’homme en Algérie. Ihsane El Kadi, un journaliste et patron de presse de renom, a été condamné à sept ans de prison, dont deux avec sursis, par la justice algérienne. Cette décision a suscité un tollé dans les milieux journalistiques et demeure un exemple frappant de la répression de la liberté d’expression en Algérie.
Ihsane El Kadi, fondateur des médias privés Maghreb Émergent et Radio M, était poursuivi en vertu de l’article 95 bis du Code pénal algérien, introduit en avril 2020. Cet article punit de cinq à sept ans de prison quiconque reçoit des fonds ou des avantages d’un État, d’une institution ou d’un organisme public ou privé pour accomplir des actes susceptibles de porter atteinte à la sécurité de l’État, à la stabilité et au fonctionnement normal de ses institutions, à l’unité nationale, à l’intégrité territoriale, aux intérêts fondamentaux de l’Algérie ou à la sécurité et à l’ordre publics.
Les faits que lui sont reprochés sont liés à la réception de fonds de sa fille, Tin Hinane, résidant à Londres, qui est actionnaire d’Interface Médias, la société qui chapeaute les deux médias. L’argent, d’un montant de 25 000 livres sterling, était destiné à régler des dettes du groupe. Cependant, la justice a estimé que ces fonds étaient de nature à porter atteinte à la sécurité de l’État, sans fournir de preuves concrètes pour étayer ces allégations.
La condamnation d’Ihsane El Kadi a été qualifiée de "choquante" et "injuste" par les organisations de défense de la liberté de la presse et des droits de l’homme. Reporters sans frontières (RSF) a dénoncé une procédure policière et judiciaire "kafkaïenne" et un acharnement contre le journaliste. L’ONG a souligné l’absence de preuves dans le dossier judiciaire pour étayer les accusations portées contre Ihsane El Kadi.
La décision de justice a également entraîné la dissolution de la société Interface Médias et la confiscation de tous les biens saisis du journaliste. Des amendes ont été prononcées à son encontre ainsi qu’à l’égard de ses entreprises. Cette mesure a été perçue comme une attaque frontale contre la liberté d’expression et l’indépendance des médias en Algérie.
La communauté internationale a exprimé son inquiétude face à cette condamnation. Amnesty International a estimé que Ihsane El Kadi a été condamné sur la base d’accusations infondées et a exigé sa libération. Le représentant de RSF, Khaled Drareni, a qualifié la peine de "surréaliste" et a dénoncé la dérive de la justice algérienne.
Le cas d’Ihsane El Kadi n’est pas isolé. En Algérie, de nombreux journalistes et activistes ont été poursuivis et condamnés pour des délits liés à la liberté d’expression. La situation des droits de l’homme dans le pays suscite de plus en plus de préoccupations. La liberté de la presse et d’expression est de plus en plus restreinte, et les voix dissidentes sont de plus en plus bâillonnées.
Le verdict dans l’affaire Ihsane El Kadi a suscité un vaste écho sur les réseaux sociaux. De nombreux internautes ont exprimé leur solidarité avec le journaliste et leur indignation face à la décision de justice. Le journaliste Hassan Ouali a tweeté : "Le verdict de l’histoire sera cruel et sans appel ni circonstance atténuante. Le jour où il sera rendu – dans pas longtemps –, Ihsane El Kadi sera du côté glorieux de l’histoire."
La condamnation d’Ihsane El Kadi est un signal alarmant pour la liberté d’expression en Algérie. Elle illustre la répression de plus en plus sévère exercée contre les voix indépendantes et les médias critiques. Il est essentiel que la communauté internationale prenne conscience de cette situation et exerce des pressions sur les autorités algériennes pour qu’elles respectent les droits fondamentaux des citoyens, notamment la liberté d’expression et d’information. La liberté de la presse est un pilier essentiel de la démocratie, et il est crucial de la défendre avec vigueur face aux atteintes qui lui sont portées.