Après l’âge de cinquante ans, un homme sur cinq est victime d’une fracture liée à l’ostéoporose.
En se promenant sur une plage, Jacky, âgé de 71 ans, glisse sur des algues, tombe de toute sa hauteur et se fracture deux côtes. On lui dit qu’il n’a pas eu de chance. Vraiment? Pour le Pr Béatrice Bouvard, rhumatologue au CHU d’Angers, corédactrice des recommandations nationales de traitement de l’ostéoporose chez l’homme, « ce n’est pas simplement une histoire de malchance. Tout le monde ne se fait pas de fracture en tombant de sa hauteur même après 70 ans, cela mérite des investigations ». L’ostéoporose menace, et d’ailleurs, il n’y a pas forcément besoin de tomber: les fractures vertébrales ostéoporotiques peuvent survenir en soulevant un pot de fleurs, voire spontanément.
L’os est un tissu vivant qui se remodèle continuellement avec, normalement, un équilibre entre la destruction et la formation osseuse. Mais s’il y a trop de destructions ou pas assez de constructions, cela conduit à une fragilité osseuse anormale: l’ostéoporose. Cataloguée comme étant la maladie des femmes ménopausées, elle touche pourtant aussi les hommes surtout après quatre-vingt-dix ans. Comme le rappelle le Pr Bouvard, « 20 % des hommes auront une fracture ostéoporotique après 50 ans, et avec le vieillissement de la population, le nombre d’hommes concernés ne va cesser d’augmenter ».
« Instaurer un traitement spécifique »
L’ostéoporose masculine n’a donc rien d’exceptionnel, mais elle est très peu diagnostiquée, et encore moins bien prise en charge que dans les cas féminins: 95 % des hommes hospitalisés pour une fracture ostéoporotique ne reçoivent pas un traitement adapté à leur ostéoporose dans l’année qui suit leur hospitalisation, alors que les conséquences sont redoutables avec un risque élevé de récidive de fracture ostéoporotique, d’altération de la qualité de vie, et un risque augmenté de décès notamment après une fracture de hanche. « Un quart des hospitalisations pour fracture de hanche surviennent chez les hommes. Or, après une hospitalisation pour ce problème, 20 % vont décéder dans l’année qui suit », confirme le Pr Bouvard.
Il est donc vraiment important de mieux repérer les hommes les plus à risque: ceux qui ont déjà eu une fracture ostéoporotique, ceux qui ont passé le cap des 70 ans et/ou qui ont une maladie inflammatoire chronique, une intoxication alcoolique, une prise prolongée de cortisone, une sécrétion insuffisante de testostérone, etc. Les hommes traités par hormonothérapie dans le cadre d’un cancer de la prostate sont aussi à haut risque d’ostéoporose. Réaliser une ostéodensitométrie quand existent des facteurs de risque est très important: plus la densité osseuse est basse, plus le risque de fracture augmente.
Le traitement proposé a pour objectif de diminuer le risque de faire (refaire) une fracture. « Si une bonne hygiène de vie avec une activité physique en charge comme la marche, la prévention des chutes, ainsi que des apports suffisants en calcium et en vitamine D sont nécessaires, ces mesures sont insuffisantes pour traiter une ostéoporose. Il faut absolument instaurer un traitement spécifique de cette fragilité osseuse anormale, seul à même de diminuer le risque », conclut le Pr Bouvard.
Traiter au masculin
Hormis le traitement hormonal de la ménopause et le raloxifène – un modulateur des récepteurs aux œstrogènes – qui sont spécifiques au traitement de l’ostéoporose féminine, les autres traitements s’utilisent aussi bien chez les hommes que chez les femmes. Les bisphosphonates et le dénosumab freinent la destruction de l’os. Le tériparatide stimule la formation osseuse.