Boualem Sansal : L’écrivain franco-algérien confronté à la justice algérienne
Boualem Sansal, l’écrivain franco-algérien reconnu pour ses œuvres audacieuses et critiques, traverse une période sombre. Âgé de 80 ans, il a été placé sous mandat de dépôt par le procureur d’Alger, au tribunal de Dar-El-Beïda, sur des accusations très graves. Incarcéré le 21 novembre dans la prison de Koléa, il a rapidement été transféré à l’hôpital Mustapha-Pacha, en raison de son état de santé. Selon une source judiciaire, il se trouve dans un état acceptable et a fait appel de la décision qui l’a placé en détention.
Les accusations portées contre lui sont particulièrement lourdes. Boualem Sansal est notamment accusé d’« atteinte à l’intégrité du territoire national », une qualification qui, selon la législation algérienne, pourrait impliquer des accusations de terrorisme. L’article 87 bis du code pénal algérien stipule que de tels actes peuvent entraîner une réclusion criminelle à perpétuité, voire la peine de mort. Bien que l’exécution capitale soit en sommeil dans le pays depuis près de trois décennies, la gravité des accusations soulève de vives inquiétudes quant à son avenir.
Le climat politique en Algérie est particulièrement tendu, et certains observateurs pensaient que les autorités allaient opter pour une solution moins punitive, telle qu’un contrôle judiciaire accompagné d’une interdiction de quitter le territoire. Cette approche aurait permis d’éviter une incarcération qui pourrait ternir l’image du pays sur la scène internationale. Des voix critiques, y compris celle d’Abdelaziz Rahabi, ancien ministre de la culture, ont souligné que l’arrestation de Sansal pourrait finalement être contre-productive pour l’Algérie, malgré ses avis souvent tranchants sur l’auteur.
L’interpellation de Sansal, survenue le 16 novembre, a suscité une onde de choc tant au niveau national qu’international. À son arrivée à l’aéroport d’Alger, des agents de la sécurité intérieure l’ont appréhendé sans fournir d’explication immédiate. Pendant plusieurs jours, aucune information officielle sur son sort n’a filtré, ce qui a nourri des inquiétudes quant au respect de ses droits et à la transparence de la procédure. L’agence de presse officielle Algérie Presse Service a finalement confirmé son arrestation en le qualifiant de « pseudo-intellectuel », offrant ainsi un aperçu du climat hostile dans lequel évolue l’écrivain.
Au fil des jours, les espoirs d’une libération rapide se sont progressivement évanouis. Les délais de garde à vue, censés être limités pour des délits mineurs, ont été largement dépassés, amplifiant les craintes concernant la gravité des accusations. La perspective d’une enquête pour des actes qualifiés de terroristes a alors semblé inéluctable.
Dans un pays où la liberté d’expression est de plus en plus réprimée, la situation de Boualem Sansal illustre un durcissement significatif des autorités. Ses œuvres, souvent scrutées et critiquées, abordent des thèmes délicats et dérangeants, mais cela ne fait pas de lui un ennemi de l’État. Au contraire, il est devenu une figure emblématique pour ceux qui prônent une discussion ouverte sur les problématiques algériennes, y compris le passé colonial et les défis contemporains.
Dans le tumulte de la situation actuelle, il reste à espérer que la voix de Boualem Sansal, tant appréciée à l’international, résonne une fois de plus au-delà des murs de la prison. Son incarcération pourrait bien susciter une vague de solidarité et un mouvement pour la défense des droits humains en Algérie, surtout envers ceux dont les voix sont étouffées par la répression.