REPORTAGE – Kiev est confrontée à un défi de taille alors que l’armée russe gagne du terrain : la corruption généralisée entrave les efforts de recrutement des conscrits et des fonctionnaires.
Dans les ruelles sombres de la capitale ukrainienne, une atmosphère de méfiance règne parmi les hommes en âge de combattre. Olexandr, un homme de 39 ans, se faufile discrètement pour échapper à la conscription obligatoire. Depuis six longs mois, il vit dans la clandestinité, prêt à tout pour éviter de prendre les armes. Même à payer le prix fort.
La pression monte alors que l’armée russe avance inexorablement. Kiev se retrouve face à un dilemme : comment mobiliser efficacement ses troupes lorsque la corruption gangrène le système ? Pour de nombreux Ukrainiens, la solution passe par des pots-de-vin et des combines douteuses. Olexandr, par exemple, a dû vendre son taxi pour réunir les 6000 dollars nécessaires à l’obtention de faux certificats d’invalidité.
Cette somme astronomique reflète la désespérée situation économique du pays, où le salaire moyen peine à dépasser les 400 euros par mois. Dans ces conditions, il est tentant de contourner les règles pour échapper à la mobilisation. Mais à quel prix ? Olexandr prend des risques énormes en se cachant, conscient que la moindre erreur pourrait lui coûter cher.
La guerre se rapproche, inexorablement. Les immeubles soviétiques de Kiev semblent observer silencieusement la montée des tensions. Les familles se déchirent, les jeunes hommes se dérobent, les autorités s’interrogent sur la façon dont elles pourront mobiliser suffisamment de troupes pour repousser l’ennemi.
La corruption, ce fléau qui gangrène les institutions ukrainiennes depuis des années, apparait comme un obstacle majeur à la cohésion nationale. Comment demander aux citoyens de se battre pour leur pays lorsque les officiels ne sont pas exemplaires eux-mêmes ? Les réformes tardent à venir, les mentalités peinent à évoluer. Et pendant ce temps, la menace se rapproche.
Olexandr, lui, continue de vivre dans l’ombre, espérant échapper à un destin qu’il n’a pas choisi. Sa casquette noire dissimule mal sa peur, son anxiété. Chaque bruit de pas, chaque regard en coin le fait frissonner. Mais il n’a pas le choix. Il doit rester caché, éviter les patrouilles, contourner les barrages. Car pour lui, la guerre est une lointaine abstraction, un cauchemar qui pourrait devenir réalité à tout moment.