Les 17 prisonniers politiques de l’Arménie d’Artsakh à comparaitre dans un procès controversé
Bakou, 17 janvier 2024 – La justice azérie a annoncé que 17 des 23 prisonniers politiques, capturés par l’armée azérie lors de la conquête du Haut-Karabakh en septembre 2023, allaient comparaître vendredi devant un tribunal militaire à Bakou. Parmi les accusés figurent trois anciens présidents de la République d’Artsakh, Arkadi Ghukasyan, Ariyak Harutyunyan et Bako Sahakyan, ainsi que l’ex-ministre d’État Ruben Vardanyan, qui est accusé de 44 infractions présumées.
La procédure est considérée comme hautement politique et controversée. Les avocats des prisonniers politiques dénoncent des irrégularités, notamment le fait que la justice azérie a refusé d’admettre des journalistes, des ONG et des familles pour l’audience préliminaire. Ils s’inquiètent également du manque d’indépendance et d’impartialité du système judiciaire azéri, qui selon Freedom House, est sous la tutelle du régime.
«Ce procès est un outil de répression contre les dirigeants d’Artsakh et un moyen pour le gouvernement azéri de détruire l’héritage de la région», a déclaré Jared Genser, avocat international spécialisé dans les droits de l’homme qui défend Ruben Vardanyan. «Les autorités azéries veulent éradiquer l’identité et l’existence de l’Arménie d’Artsakh.»
Selon Genser, les prisonniers politiques n’ont pas pu avoir accès au dossier de l’accusation avant la procédure, ce qui est en contradiction avec les normes juridiques internationales. «Les autorités ont invoqué le secret d’État pour justifier cela, mais cela est tout à fait illogique. Les prisonniers politiques ont le droit de connaître les charges contre eux et de préparer leur défense», a-t-il ajouté.
Ruben Vardanyan, philanthrope venu de Russie pour aider le peuple du Haut-Karabakh après la guerre de 2020, est spécialement visé par les autorités azéries. Il est accusé de 44 infractions présumées, notamment de planification et de conduite d’une guerre d’agression, de violation du droit international humanitaire et de terrorisme. Si reconnu coupable, il risque la prison à vie.
Les proches de Ruben Vardanyan sont très préoccupés par sa santé, après quinze mois de détention dans des conditions de privation de liberté totale. Ils n’ont reçu que quelques appels via la Croix-Rouge et ont demandé à être informés des développements du procès.
Le gouvernement azéri a qualifié les prisonniers politiques de «criminels» qui ont mené une guerre sanglante contre l’Azerbaïdjan et commis des actes de vandalisme. Cependant, les réseaux internationaux et les gouvernements occidentaux ont dénoncé la détention des prisonniers politiques comme abusives et ont appelé à leur libération.
Le Sénat français a voté une résolution demandant la libération sans délai des prisonniers politiques de la République du Haut-Karabakh, considérés comme des représentants légitimes du peuple de ce territoire. L’Union Européenne a également déploré la détention des prisonniers politiques et a appelé à une solution pacifique au conflit.
Les tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan sont encore très vives après la guerre éclair de septembre 2023, qui a fait des centaines de morts, dont de nombreux civils. La république d’Artsakh a cessé d’exister le 1er janvier 2024, après que les autorités eurent signé un décret de dissolution des institutions. Le Haut-Karabakh est toujours un terrain de confrontation entre les deux parties, qui ont des revendications contradictoires sur ce territoire.