Le mélanome, un cancer de la peau méconnu : les dermatologues plaident pour un dépistage ciblé
Le mélanome, un cancer de la peau agressif et meurtrier, continue de faire des ravages en France. Selon les derniers chiffres, près de 18 000 cas sont diagnostiqués chaque année, et les retards de diagnostic mettent en péril la santé des patients. Pourtant, les dermatologues, souvent sollicités inutilement, estiment que le dépistage systématique n’est pas la solution et plaident pour un dépistage plus ciblé des personnes à risque.
Une pénurie de dermatologues, un parcours du combattant pour les patients
Un reportage récent d’Envoyé Spécial sur France 2 a mis en lumière la pénurie de dermatologues en France et ses conséquences dramatiques. Les patients doivent souvent attendre des semaines, voire des mois, pour obtenir un rendez-vous chez un spécialiste. Cette situation est d’autant plus préoccupante que certaines maladies dermatologiques évoluent rapidement et nécessitent une prise en charge rapide.
Des consultations inutiles, un gaspillage de ressources
Selon le Dr Jean-Nicolas Scrivener, dermatologue au CHU de Strasbourg, de nombreuses personnes consultent les dermatologues sans raison valable. "Nous voyons des personnes jeunes avec leurs enfants qui ne sont pas des populations à risque de faire un mélanome", explique-t-il. Le mélanome survient en effet le plus souvent après 60 ans et jamais chez les enfants. L’idée que il est nécessaire de faire surveiller sa peau et ses grains de beauté une fois par an est bien implantée dans la population, mais elle n’est pas réalisable et ne démontre pas son efficacité pour réduire la mortalité du mélanome.
Dépister les personnes à risque, une approche plus efficace
Les dermatologues estiment que le dépistage doit être ciblé sur les personnes les plus à risque. "Nous devons cibler les dépistages sur les personnes les plus à risques", plaide le Pr Gaëlle Quéreux, chef du service de dermatologie du CHU de Nantes et ancienne présidente de la Société française de dermatologie. Les personnes dont la peau est claire, les cheveux roux ou blonds et qui bronzent difficilement sont plus à risque qu’une personne à la peau mate. Avoir des taches de rousseurs, avoir eu des coups de soleil dans l’enfance ou avoir la peau parsemée de très nombreux grains de beauté (plus de 50) aumente également le risque de développer un mélanome.
Le rôle du médecin traitant, un premier filtre
Le médecin traitant doit jouer un rôle clé dans le dépistage du mélanome. "La première personne à consulter est le médecin traitant, qui, à condition qu’il soit un peu formé, va pouvoir faire le tri", explique le Dr Jean-Nicolas Scrivener. Les médecins traitants peuvent utiliser les systèmes de télé-expertise pour envoyer des photos à un dermatologue pour analyse. Cela permet de réduire les délais d’attente et de cibler les consultations sur les personnes les plus à risque.
Les facteurs de risque, une vigilance accrue
Les personnes qui présentent des facteurs de risque doivent être particulièrement vigilantes. Avoir eu des cas de mélanomes dans la famille, avoir déjà eu un mélanome ou être immunodéprimé sont des facteurs de risques supplémentaires. Les grains de beauté qui grossissent, qui changent de couleur ou qui saignent doivent susciter une attention particulière. La règle ABCDE (asymétrie, bords irréguliers, couleur non homogène, diamètre supérieur à 6 mm, évolution de la tâche) peut aider à repérer les taches qui méritent une consultation, mais elle doit être utilisée avec prudence pour éviter les faux positifs.
Une prise de conscience, une meilleure prévention
La prise de conscience du mélanome et de ses risques est essentielle pour prévenir cette maladie. Les dermatologues estiment que la population doit être mieux informée sur les facteurs de risque et les signes de alarme. Les campagnes de prévention et les programmes de dépistage ciblés peuvent aider à réduire la mortalité du mélanome. En attendant, les patients doivent rester vigilants et consulter leur médecin traitant en cas de doute. Le mélanome est un cancer de la peau qui peut être vaincu, mais il faut agir tôt et de manière ciblée.