REPORTAGE – Une manifestation monstre réunit des milliers de fidèles juifs orthodoxes à Jérusalem. Leur refus de se conformer à la décision de la Cour suprême soulève un tollé dans tout Israël. Pour les leaders religieux alliés à Netanyahou, c’est une impasse politique.
Correspondant spécial à Jérusalem
Casquettes rondes et larges chapeaux, kippas en velours, tuniques et chemises immaculées : la rue Natan-Strauss s’anime progressivement en cette fin d’après-midi, au cœur de Mea Shearim, le grand quartier ultra-orthodoxe de Jérusalem. Au son des chofars, les hommes entament des prières en yiddish. Des haut-parleurs puissants diffusent leurs voix au-dessus de la foule. La manifestation a été organisée à l’ancienne, avec des tracts jetés à pleines mains dans les rues, des affiches placardées, et des appels téléphoniques via des répondeurs pour informer cette communauté qui bannit internet et les smartphones.
Le message est clair : non à la conscription obligatoire des haredim, ces juifs ultra-orthodoxes craignant Dieu. De grands rabbins et des chefs d’écoles talmudiques ont approuvé l’appel à manifester.
Non à « l’État sioniste »
Nouvelle étape d’un long combat pour préserver leurs traditions ancestrales, les haredim voient dans cette décision de la Cour suprême une menace pour leur mode de vie. En effet, ils considèrent que le service militaire obligatoire va à l’encontre de leurs préceptes religieux et de leur identité en tant que communauté ultra-orthodoxe.
Les manifestants scandent des slogans hostiles à l’État sioniste. Pour eux, l’obligation de servir dans l’armée israélienne est une attaque directe contre leur foi et leur mode de vie. Ils craignent une perte de leurs valeurs traditionnelles et une assimilation forcée dans la société israélienne laïque.
Face à cette mobilisation massive, le gouvernement dirigé par Benyamin Netanyahou semble désemparé. Les débats au Parlement s’enflamment, avec des députés soutenant la cause des haredim et d’autres critiquant vivement leur refus de contribuer à l’effort national de défense.
Les partisans du service militaire obligatoire argumentent que chaque citoyen israélien doit contribuer à la sécurité de l’État, quelles que soient ses croyances religieuses. Pour eux, il n’est pas juste que certains groupes soient exemptés de cette responsabilité, mettant ainsi en péril la cohésion nationale.
La question de la conscription des haredim divise profondément la société israélienne. Les tensions entre laïcs et religieux s’intensifient, mettant en péril l’unité du pays. Les ultra-orthodoxes refusent de se plier aux exigences de l’État, affirmant leur droit à pratiquer leur foi sans ingérence extérieure.
Dans ce contexte explosif, le Premier ministre Netanyahou tente de trouver un compromis pour apaiser les esprits et éviter une crise politique majeure. Mais les négociations sont difficiles et les positions des deux camps semblent irréconciliables.
La manifestation des haredim à Jérusalem est un signal fort envoyé à l’ensemble de la société israélienne. Elle montre que cette communauté est prête à tout pour protéger ses valeurs et sa liberté religieuse, même au prix d’une confrontation ouverte avec l’État.
Le bras de fer entre les haredim et le gouvernement israélien est loin d’être terminé. Chacun campe sur ses positions, et le dialogue semble au point mort. Dans un pays déjà marqué par de profondes divisions, cette nouvelle crise risque de fragiliser davantage la cohésion nationale et de raviver les tensions entre communautés.