REPORTAGE – Triathlon: un succès populaire lors des Jeux olympiques de début août a de nouveau enflammé le centre de Paris pour son édition paralympique ce lundi. Du beau monde au bord de la route, des grands sourires et même des cornes de brume… il ne flottait pas exactement l’air d’un lundi de rentrée dans Paris. Malgré le report de 24 heures des épreuves de paratriathlon en raison d’une eau de qualité insuffisante dans la Seine, la discipline faisait toujours recette ce lundi, pourtant pas le jour le plus festif de l’année. Mais un mois après la grande ferveur populaire dans la foulée des médaillés Cassandre Beaugrand et Léo Bergère, le triathlon était toujours à la fête en plein cœur de Paris.
« J’ai eu la chair de poule sur la fin, confie Julie Marano, guide d’Annouck Curzillat, cinquième dans la course PTVI féminine. On aurait pu perdre nos moyens tellement c’était euphorisant. On a pris l’énergie du public, c’était incroyable tout ce monde sur le bord de la route. » Arrivé seul devant une foule qui n’attendait que lui, Alexis Hanquinquant a salué une « ambiance complètement dingue aujourd’hui » après sa démonstration en paratriathlon. Le double médaillé d’or en a d’ailleurs profité jusqu’au bout, en étirant en longueur sa dernière ligne droite sur le Pont Alexandre III, en face des Invalides, où il a savouré chaque instant de sa consécration à la maison.
« Célébré par une foule qui n’avait d’yeux que pour lui, en témoignent les multiples banderoles et drapeaux à son effigie », le porte-drapeau arborait un sourire radieux au moment d’évoquer un engouement qui n’en démord pas depuis un mois, de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques aux « Paras »: « Merci aux Français, on peut être chauvins et râleurs, mais on a prouvé sur ces Jeux qu’on était une grande nation de sport et de supporters, alors merci pour aujourd’hui et la semaine qui arrive. »
Animé aux quatre coins du parcours, tracé dans ce que le centre de Paris a de plus beau, le public a donné de la voix pour dans cette session XXL, où pas moins de onze épreuves se sont succédées entre 8h et 14h. Un joyeux public toutefois amputé en partie, la faute au report du dimanche au lundi, forcément moins propice à la liesse populaire, a fortiori quand c’est la rentrée, au bureau comme à l’école. « On aurait dû être encore plus nombreux, une dizaine d’Alsaciens en plus », souffle un ami d’enfance de Michaël « Kiki » Horter, 9e chez les PTS3, grand sourire dès qu’il s’agissait de lever les bras pour saluer les copains.
« Le seul point noir était celui de voir les gens venus hier faire demi-tour avec le report. Beaucoup ont fait l’effort de venir quand même un lundi, c’était noir de monde à plein d’accès. Encore merci », a poursuivi Hanquinquant, dont les enfants étaient quand même présents devant les Invalides, et dont le mot d’absence sera donc tout trouvé. Le public était forcément plus mature, à l’accent étranger aussi. On entendait les « USA, USA », on voyait Veronika Plebani, future médaillée d’argent italienne, communier avec son public et même le Sud-coréen Hwang Tae Kim, survolté par son petit virage de supporters, invitant tout le public à faire du bruit, lui qui n’a pourtant aucun de ses deux bras.
Le report n’aura donc pas entamé l’engouement populaire autour de la discipline, preuve aussi que le sport gratuit fait toujours recette. Un report motivé pour des raisons sanitaires, la Seine étant jugée de qualité insuffisante dimanche, mais la page est désormais tournée. « On nous a bassinés avec la Seine depuis trois ans, on en a fait toute une montagne et franchement ça nous a saoulés, a concédé Cyril Viennot, guide médaillé d’argent avec Thibaut Rigaudeau pour sa dernière course à ce niveau. On s’entraîne et on court dans des endroits bien moins propres que ça. L’eau y est plus claire que dans plein d’eau qu’on pratique toute l’année. »
« Franchement, ça aurait été dommage de ne pas nager, on est sur un site exceptionnel. Quand on est sur le ponton, avec la Tour Eiffel en face », image son binôme Thibaut Rigaudeau, des étoiles plein les yeux malgré une maladie dégénérative aux yeux. Son guide complète: « On voulait à tout prix nager, alors ce n’est pas grave si on doit être malade pendant trois jou rnés. » « On était contentes que ce soit un triathlon, on ne va pas se le cacher, renchérit Julie Marano. On aurait été déçu avec encore un duathlon à Paris. » Un an plus tôt, le test-event de Paris avait fait une croix sur la partie natation en raison de la qualité de la Seine. Comme lors des épreuves olympiques, ce n’était plus un problème. Pas plus que le fait de nager à contre-courant, un défi propre au mythique fleuve parisien. « Le courant est toujours un élément extérieur et c’est comme le vent à vélo, on se doit de faire avec », reprend Marano, arrivée à deux minutes du podium avec son binôme. Le courant nous a freinés, on est sorties plus épuisées de l’eau que d’habitude, mais c’est pareil pour tout le monde. »
Une philosophie pour résumer la pensée collective, alors que la grande majorité des paratriathlètes, rongée par l’effort dans la Seine puis sous l’étouffante chaleur parisienne, s’est trimballée dans ce « Paris carte postale » avec le sourire. « Les athlètes étaient très heureux d’avoir nagé dans la Seine et de courir dans Paris, résume le DTN Benjamin Mazé. Ils ont tous le sentiment d’avoir pris part à un événement unique et exceptionnel. »