Marseille se Souvient : Six Ans Après les Effondrements de la Rue d’Aubagne
Le 5 novembre 2024, Marseille commémore avec émotion les huit victimes des tragiques effondrements survenus dans la rue d’Aubagne, il y a six ans. Cette journée de recueillement revêt une signification particulière, alors qu’un procès tant attendu débute dans deux jours, suscitant espoir et anxiété parmi les familles endeuillées.
Au petit matin, dès 8h30, plus de 200 personnes se regroupent rue d’Aubagne, sur les lieux mêmes de la catastrophe, au cœur du 1er arrondissement. Entre proches des victimes, résidents du quartier, militants associatifs défendant la cause de l’habitat digne, et membres du collectif 5 novembre, la foule témoigne d’une solidarité indéfectible. Le maire de Marseille, Benoît Payan, s’est également joint à cet hommage, soulignant l’importance de cette mémoire collective.
À 09h07, l’heure où les bâtiments se sont effondrés en 2018, les cloches de l’église toute proche diffusent des tintements doux, faisant écho au chagrin des parents et amis présents. Les portraits des victimes, Julien Lalonde et Simona, sont brandis haut, représentant des vies interrompues à l’aube de la trentaine. Parmi les proches, Chérif, victime à 36 ans, est particulièrement présent dans les cœurs. Fils unique et père d’une petite fille, aujourd’hui âgée de 10 ans, son absence pèse lourdement sur sa famille.
Un moment poignant de la cérémonie survient lorsque des torches et des fleurs blanches sont offertes par les proches, accompagnés de volontaires solidaires. Une dame âgée, membre de la famille, étreint avec précaution des fleurs blanches avant de s’adresser, en arabe, à une proche : "Mon fils, donne-moi la torche, je veux la porter aussi." Ses mots, chargés de douleur, illustrent l’intensité du souvenir et de l’affection.
Lynda, cousine de Chérif, est venue chaque année depuis l’Algérie pour se joindre à cette cérémonie. Pour elle, 2024 revêt une signification particulière car ses oncles et tantes ont fait le voyage depuis Annaba. "Être ensemble nous aide à tenir," confie-t-elle, exprimant le soutien mutuel qui s’est tissé entre les familles touchées par ce drame.
Saida, une autre cousine, partage son soulagement pour l’appui reçu de la mairie de Marseille, qui a facilité leur venue. "Grâce à eux, notre famille a pu venir depuis Annaba en Algérie," témoigne-t-elle. Dans un moment empreint d’émotion, la mère de Chérif exprime son gratitude pour la solidarité dont sa famille a bénéficié ces derniers jours. "On est touchés par toute cette solidarité," dit-elle, la voix tremblante, essuyant quelques larmes.
Dans son discours, Lynda appelle à la patience et à la compréhension vis-à-vis des efforts des autorités publiques. "Cette tragédie ne pourra pas être réparée en quelques années," explique-t-elle, rappelant que le changement demande du temps et des efforts coopératifs de la municipalité et de l’État. Elle insiste sur la nécessité de garantir la sécurité des habitants pour éviter un retour à l’imprévu et à la tragédie.
Enfin, Saida évoque la détermination de la famille de Chérif face aux défis qui les attendent : "Jeudi 7 novembre, marque le début pour nous du chemin le plus difficile." Tous les membres de la famille sont prêts à prendre un congé prolongé pour ne manquer aucune journée du procès. "Nous ne raterons aucune audience," affirment-ils à l’unisson, déterminés à obtenir justice pour Chérif et les autres victimes.
La commémoration du 5 novembre illustre ainsi non seulement la mémoire des disparus, mais aussi la volonté des familles de se battre pour la vérité et la justice, dans un contexte où la lutte pour un habitat digne demeure une préoccupation majeure à Marseille.