ON A OUVERT LES PORTES – Avec l’océan en toile de fond, à seulement 10 minutes de la Kasbah des Oudayas, le Four Seasons vient d’inaugurer son enseigne sur une ancienne résidence d’été d’un sultan, puis un hôpital militaire. Une troisième vie tant attendue par les passionnés du patrimoine et un nouveau joyau hôtelier dans une capitale qui affiche clairement ses ambitions touristiques.
Face à un bâtiment exceptionnel, un projet pharaonique a vu le jour : il a fallu sept ans (en tenant compte de la période de Covid-19) au groupe émirati Modon Holding, propriétaire des lieux, pour reconstruire à l’identique l’hôpital Marie-Feuillet, l’un des monuments les plus emblématiques du patrimoine de Rabat, afin de le transformer en un hôtel de luxe déjà surnommé le « Palace au bord de la mer ».
Un lieu historique emblématique, une nouvelle adresse phare
Un véritable sauvetage : érigé au début du XXe siècle à côté de l’ancienne résidence d’été du sultan Moulay Slimane du XVIIIe siècle, ce complexe architectural, l’un des plus vastes datant du protectorat français au Maroc, était dans un état avancé de délabrement depuis sa fermeture en 1999. De la construction à la rénovation, les trois anciens pavillons ont été réhabilités, dévoilant aujourd’hui des façades élégantes d’un blanc éclatant ornées d’arcades encadrées de zelliges, de colonnades en pierre claire et d’auvents festonnés de tuiles vertes. Malgré l’opposition du Maréchal Lyautey, résident général à l’époque, le retour de ces éléments caractéristiques de l’architecture néomauresque réjouit à la fois l’œil et le cœur des passionnés du patrimoine. Dès son ouverture (encore partielle) en octobre, les R’batis locaux et d’adoption se sont précipités pour admirer la transformation. « Il y avait une forte attente de la population locale qui souhaitait depuis longtemps que ce lieu reprenne vie. C’était une grande responsabilité pour nous, nous devions vraiment rendre hommage à ce site », souligne Grégory Viaud, directeur général de l’hôtel, qui a croisé pendant les travaux une vieille dame en pèlerinage : infirmière à l’hôpital Marie-Feuillet, elle y avait rencontré son futur mari alors qu’il était hospitalisé !
Un clin d’œil à la tradition et à l’Art déco
Pour convertir le site en complexe hôtelier, l’architecte Karim Chakkor a dû ajouter cinq nouveaux bâtiments aux six bâtiments historiques, une extension réalisée avec finesse : leurs lignes sobres s’intègrent parfaitement, conciliant les différents styles. Ce même souci se retrouve dans la décoration très réussie signée par l’agence Nazarian Architecture. Dès l’entrée, le Noora Lounge Lobby, conçu comme un « lien entre l’ancien et le modernisme », donne le ton. Sous une verrière éblouissante ornée de carreaux de verre coloré, le patio à arcades rappelle à la fois le savoir-faire local et l’Art déco marocain du début du XXe siècle, dont les formes géométriques résonnent avec les lignes traditionnelles. Des frises généreuses de zelliges sur les murs et des luminaires en cuivre ciselés côtoient des sièges aux courbes des années 1930. « J’ai beaucoup insisté sur les matériaux et le savoir-faire locaux, mais avec une approche renouvelée afin que tous les clients, quel que soit leur profil et leur âge, puissent s’y retrouver », explique Roger Nazarian, qui a apporté une touche d’audace sur les couleurs. En plus du doré et du vert-de-gris emblématiques du royaume chérifien, on retrouve des touches plus vives, comme dans le Bird Lounge où le vert émeraude translucide des tables fait écho aux couleurs chatoyantes du grand tapis. Un peu partout, le orange rappelant le lever du soleil ou le turquoise évoquant l’océan Atlantique voisin réchauffent l’atmosphère, saluant également les peintres marocains épris de couleurs. Un accent particulier est mis sur les tapis sur mesure, aux couleurs éclatantes, et les variations de nuances des marbres, notamment les roses et les verts du restaurant principal Flamme.
Un clin d’œil aux bijoux berbères et à la ville de Rabat
Réparties principalement dans les trois bâtiments historiques de l’hôpital et dans un nouveau bâtiment, les 200 chambres et suites offrent des vues partielles ou panoramiques sur l’océan (un luxe à Rabat), sur les jardins et la piscine, ou, pour quelques-unes, sur la ville. Dans les bâtiments anciens, les superficies sont généralement moins grandes (37m2 minimum au lieu de 44m2), mais les hauts plafonds et les grandes fenêtres compensent cette différence. La décoration, élégante, est plus feutrée que dans les espaces communs, avec des tons froids, dominés par des nuances de taupe ou de vert-de-gris mêlées de beige, sur lesquels se détachent les couleurs vives des terrasses et des balcons. On y retrouve des clins d’œil à l’Art déco et à la culture locale, avec des luminaires rappelant les bijoux berbères, ou des moquettes exubérantes évoquant le plan de la ville de Rabat. Revêtues de marbre clair, les salles de bains, dont 80% sont équipées de baignoires, bénéficient pour la plupart de lumière naturelle, avec certaines offrant une vue sur l’océan pendant le bain. Parmi les 40 suites spacieuses et lumineuses (de 60m2 à 1450m2), certaines offrent des panoramas époustouflants, notamment le riad du Sultan, l’une des plus remarquables, nichée dans l’ancienne résidence d’été du sultan, s’étendant sur 950m2 avec deux beaux patios anciens communicants.
Une cuisine soignée déjà renommée
À peine ouverte, la brasserie Marie (en hommage à Marie Feuillet, l’infirmière qui a donné son nom à l’hôpital) remporte déjà un franc succès à Rabat, avec sa cuisine bistronomique revisitant les recettes traditionnelles françaises. Le chef exécutif Sebastiano Spriveri, fort de 30 ans d’expérience, veille à la qualité des produits, rigoureusement sélectionnés (80% locaux), des fruits de mer aux viandes, notamment du canard et du foie gras en provenance de la région de Fès. Certains des délicieux desserts du chef Gregory Christmant se retrouvent au Noora Lobby Lounge ou à la carte du restaurant Flamme, dédié aux spécialités marocaines et internationales avec son four à bois. Un restaurant italien et le Laila Lounge, un magnifique bâtiment voûté du XIXe siècle, ouvriront pour les fêtes de fin d’année.
Une ambiance de resort en plein cœur de la ville
À 10 minutes en voiture (30 minutes à pied) de la Kasbah des Oudayas, le Four Seasons Hotel Rabat se présente comme un resort urbain où l’on se sent vite déconnecté du temps. Pas de plage aménagée sur l’océan Atlantique qui se révèle de l’autre côté du boulevard longeant la corniche (très animée à certaines heures), mais des installations adaptées aux séjours de loisirs : une belle piscine pavée de marbre noir veiné de blanc avec deux bassins (dont l’un réservé aux adultes et chauffé toute l’année à 28°), une salle de fitness avec vue sur l’océan, et des jardins paysagers embaumés par les senteurs des herbes aromatiques. À venir également d’ici la fin de l’année, un spa de 3600m2 sur deux étages avec 10 cabines de soins (avec en exclusivité la marque Omorovicza inspirée par la tradition des thermes de Budapest), une piscine intérieure de 25 mètres de long dans un cadre spectaculaire, et un petit club pour enfants avec espace extérieur. Les tarifs commencent à partir de 500 euros la nuit en chambre supérieure, et 600 euros en chambre Premier (avec 15% de remise sur le tarif public jusqu’à fin mars 2025).
Four Seasons Hotel Rabat at Kasr Al Bahr. Ancien hôpital Marie-Feuillet, avenue Brahim Roudani, quartier de l’Océan, Rabat. Mention spéciale à Ali Akhaddar dans « L’hôpital Marie-Feuillet de Rabat, origine, histoire et évolution ».
En somme, un nouveau joyau hôtelier qui s’impose comme une adresse incontournable à Rabat, conjuguant à merveille luxe, raffinement et respect du patrimoine, pour le plus grand bonheur des voyageurs en quête d’authenticité et d’élégance.