Sous la houlette du nouvel ambassadeur de l’Union européenne en Algérie, Diego Mellado, une mission cruciale se profile à l’horizon. Celle-ci se déroulera à Alger, où une délégation de la direction générale du commerce de la Commission européenne se rendra pour un entretien de deux jours avant la mi-novembre. Lors d’un échange accordé à l’agence de presse espagnole EFE, Mellado a précisé que cette visite n’est pas liée à une quelconque procédure d’arbitrage, un point déjà écarté par le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf. Ce dernier a déclaré en septembre qu’un règlement par consentement mutuel était envisagé, qualifiant d’ailleurs une issue par arbitrage de « peu probable ».
Au cœur de cette mission se trouve la révision de l’accord d’association (AA) signé en 2002 et entré en vigueur en 2005. Les discussions prévues auront un caractère technique et aborderont plusieurs points clés, tels que les différends commerciaux, les règles d’origine, ainsi que les normes sanitaires et phytosanitaires. Ce processus de consultation s’inscrit dans le cadre d’une démarche lancée en juin dernier par la Commission européenne, visant à répondre aux préoccupations d’Alger tout en harmonisant les attentes des deux parties.
L’accord d’association n’a jamais fait l’objet d’une révision bilatérale exhaustive, malgré quelques évaluations partielles. Par exemple, une réévaluation en 2010 concernait les procédures douanières, suivie d’une évaluation conjointe en 2015, qui avait mis en lumière un déséquilibre commercial préoccupant. Notamment, les exportations algériennes hors hydrocarbures n’ont atteint que 14 milliards de dollars, tandis que les importations en provenance de l’UE se chiffrent à 220 milliards de dollars. Cette situation explique le désir d’Alger de rectifier cette balance commerciale déséquilibrée.
L’Union européenne semble de son côté déterminée à renforcer ses relations avec l’Algérie, qu’elle considère comme un partenaire stratégique. Lors de la cérémonie de remise de ses lettres de créance au président Abdelmadjid Tebboune, Mellado a souligné l’engagement ferme de l’UE à établir une coopération durable. Le représentant de l’UE a même reconnu que les clauses de l’accord actuel avaient des défauts, empêchant l’Algérie de diversifier ses échanges et de tirer pleinement parti de ses potentialités économiques.
L’algérien à la tête du pays, Abdelmadjid Tebboune, a lui aussi mis en avant la nécessité de réformer cet accord en raison des évolutions significatives de l’économie nationale. Dans le passé, l’industrie algérienne représentait à peine 3% du revenu national, et le pays se contentait d’importer des produits agricoles sans en exporter. Aujourd’hui, les choses ont radicalement changé, avec une diversification de la production allant au-delà des hydrocarbures, incluant une gamme variée de biens industriels et électroménagers.
Les consultations prévues entre le 10 et le 12 novembre prochain marqueront donc un tournant. Les autorités algériennes espèrent renforcer leur position sur le marché européen tout en attirant davantage d’investissements et en cherchant une équité dans cet accord. De son côté, l’UE, qui recherche une sécurité énergétique, devra aussi s’ajuster pour répondre aux attentes algériennes.
Pour rappel, depuis la mise en application de l’accord d’association, les échanges commerciaux entre l’Algérie et l’UE ont atteint la somme impressionnante de 1000 milliards de dollars. Cependant, les investissements européens en Algérie n’ont pas dépassé 13 milliards de dollars, principalement concentrés dans le secteur des hydrocarbures. En regardant l’année 2023, une augmentation de plus de 20% des échanges a été enregistrée par rapport à 2022, avec une projection de 15% d’accroissement pour le premier trimestre de 2024 par rapport à la même période l’année précédente.
L’enjeu actuel est donc clair : comment établir un équilibre bénéfique entre les intérêts de l’Algérie et ceux de l’Union européenne, dans un contexte où la coopération et le dialogue semblent plus que jamais nécessaires.