Le repositionnement de médicaments : une stratégie gagnante pour les maladies rares
Le 2 mars dernier, la communauté scientifique a célébré une découverte médicale majeure, fruits d’une stratégie innovante : le repositionnement de médicaments. Cette approche, qui consiste à trouver de nouvelles utilisations pour des médicaments déjà existants, a permis de sauver des vies et d’améliorer le sort de nombreux patients atteints de maladies rares. Dans cet article, nous allons explorer les principes et les réussites de cette stratégie, ainsi que les défis qui l’accompagnent.
Un gain de temps et des économies non négligeables
Le développement d’un nouveau médicament est un processus long et coûteux, qui peut prendre plusieurs dizaines voire centaines de millions d’euros et quinze années de recherche et développement en moyenne. Or, seules 5 % des 7 000 maladies rares bénéficient de traitements efficaces, laissant des milliers de patients sans espoir. C’est pourquoi de nombreux scientifiques et industriels se tournent vers le repositionnement de médicaments. Cette approche permet de gagner du temps et de réduire les coûts, puisque les conditions d’administration et les effets indésirables sont au moins en partie déjà connus.
L’exemple du Pr Guillaume Canaud
Un exemple remarquable de repositionnement de médicaments est celui du Pr Guillaume Canaud, néphrologue à l’hôpital Necker. En 2015, il a reçu un jeune patient souffrant d’une insuffisance rénale chronique et d’un syndrome de Cloves, une maladie rare responsable d’excroissances disgracieuses sur tout le corps. Après avoir découvert que la mutation responsable de cette maladie était également impliquée dans la croissance cellulaire, le Pr Canaud a trouvé un médicament déjà utilisé en cancérologie qui pouvait potentiellement traiter son patient. Après de nombreuses tractations, le médicament a été prescrit en 2016 à titre compassionnel, et la maladie a reculé de façon spectaculaire. Un essai mené ensuite sur 19 enfants et jeunes adultes a confirmé l’efficacité de ce traitement, qui a bouleversé la vie de ces patients.
Une stratégie qui a le vent en poupe
Depuis cette découverte, le repositionnement de molécules a pris son essor dans le domaine des maladies rares. La thérapie génique, qui semblait être la voie d’avenir, a montré ses limites, notamment en termes de coûts et de complexité. "La thérapie génique représente des coûts colossaux pour chaque patient traité", explique le Pr Nicolas Lévy, directeur médical et du développement clinique en neurologie dans le groupe Servier. "De plus, ce serait une erreur de croire que les maladies rares sont toutes accessibles à la thérapie génique, même si dans plus de 80 % des cas, elles sont d’origine génétique." Les petites molécules chimiques restent donc une option plus abordable et plus accessible pour de nombreux patients.
Aucune piste ne doit être négligée
La thérapie génique a certes permis de sauver ou d’améliorer le sort de nombreux enfants dans certains déficits immunitaires sévères, l’amaurose congénitale de Leber ou encore l’adrénoleucodystrophie. Mais elle n’est pas une solution miracle pour toutes les maladies rares. " Nous sommes actuellement dans un creux", reconnaît Serge Braun, directeur des programmes neuromusculaires du Généthon. "Mais toutes les innovations suivent la même courbe : après des résultats, on essuie des échecs mais on continue." La thérapie génique restera donc une arme dans l’arsenal thérapeutique des maladies rares, mais elle ne doit pas éclipser les autres pistes de recherche, notamment le repositionnement de médicaments.
Conclusion
Le repositionnement de médicaments est une stratégie gagnante pour les maladies rares, qui permet de gagner du temps et de réduire les coûts. Les exemples éxitoires, tels que celui du Pr Guillaume Canaud, montrent que cette approche peut sauver des vies et améliorer le sort de nombreux patients. Il est essentiel de poursuivre les recherches dans ce domaine et de ne négliger aucune piste, y compris la thérapie génique, pour offrir des espoirs de traitement à ceux qui en ont le plus besoin. Les défis sont nombreux, mais les récompenses sont bien plus grandes encore.