ANALYSE – Les responsables de crèche sont incités à maximiser le taux d’occupation de leurs établissements.
Des crèches « low cost » où le personnel est compté au plus juste et leurs absences souvent non remplacées. C’est, au-delà des dérives de People & Baby, le mouton noir du secteur, l’un des constats alarmants dressés par Victor Castanet dans son dernier ouvrage, Les Ogres.
Une dérive qui trouve en partie son origine dans le système de financement – particulièrement complexe – des crèches en France. En 2002, la prestation de service unique (PSU) a été mise en place, correspondant aux ressources versées par la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) à la plupart des crèches françaises, qu’elles soient publiques ou privées. Cette PSU s’ajoute au paiement des familles.
Mais l’enfer est souvent pavé de bonnes intentions : afin de garantir que les places existantes soient occupées au maximum par un enfant, et non pas inoccupées une partie du mois, la Cnaf a introduit la « PSU à l’heure », et non à la journée.
Ce calcul à l’heure pose plusieurs problèmes. D’une part, il incite les gestionnaires de crèche à maximiser le taux d’occupation pour des raisons purement financières, sans prendre suffisamment en compte le bien-être et les besoins des enfants. D’autre part, il pousse les structures à réduire les coûts en sous-dimensionnant parfois leurs effectifs, ce qui peut impacter la qualité de l’accueil et de l’accompagnement des tout-petits.
Selon Victor Castanet, cette logique de rentabilité à tout prix dans le secteur de la petite enfance est préoccupante. Les conditions de travail du personnel sont souvent difficiles, avec des salaires bas et des conditions de travail précaires. Les absences du personnel ne sont parfois pas remplacées, mettant en péril la qualité de l’accueil et la sécurité des enfants.
Il est urgent de repenser le système de financement des crèches en France pour mettre fin à cette course à l’occupation maximale des places. La qualité de l’accueil des jeunes enfants ne doit pas être sacrifiée sur l’autel de la rentabilité. Les professionnels de la petite enfance doivent pouvoir exercer leur métier dans des conditions décentes, pour le bien-être et le développement harmonieux des tout-petits qui leur sont confiés.