ANALYSE – L’archipel des Maldives, composé de 515 000 habitants, utilise habilement la rivalité entre les deux géants asiatiques pour éviter le défaut de paiement.
Il y a quelques mois à peine, le président maldivien, Mohamed Muizzu, mettait en œuvre avec enthousiasme le slogan de campagne de son parti, « l’Inde dehors ». Élu en septembre 2023, il promettait alors d’expulser les quelque 80 soldats indiens présents dans l’archipel.
Cette promesse a été tenue au printemps dernier. Après son accession au pouvoir, il a effectué des visites officielles en Chine et en Turquie, reléguant l’Inde au second plan. Mohamed Muizzu avait accusé son prédécesseur d’avoir accordé à New Delhi un droit de regard sur la politique gouvernementale lors d’un discours prononcé un mois avant son élection présidentielle.
Pourtant, le 7 octobre dernier, le président maldivien a obtenu une aide financière après une rencontre avec le Premier ministre Narendra Modi à New Delhi, première étape d’une visite officielle de cinq jours en Inde. Le gouvernement nationaliste hindou a accepté d’accorder une aide financière de 30 milliards de roupies (326 millions d’euros)…
Cette volte-face surprenante illustre la complexité des relations entre les Maldives et l’Inde, mais aussi avec la Chine. En effet, l’archipel se trouve au cœur d’une lutte d’influence entre ces deux géants asiatiques, chacun cherchant à renforcer ses liens économiques et stratégiques avec le pays insulaire.
Les Maldives, pour leur part, jouent habilement de cette rivalité pour garantir leur survie économique. En effet, l’archipel est au bord du défaut de paiement, en raison de sa dette colossale contractée auprès de la Chine pour financer des projets d’infrastructures. Cette dépendance financière envers Pékin inquiète d’ailleurs New Delhi, qui voit d’un mauvais œil l’expansionnisme chinois dans sa sphère d’influence régionale.
Face à cette situation délicate, le président Mohamed Muizzu a donc pris la décision pragmatique de renouer le dialogue avec l’Inde, afin de diversifier les sources de financement pour son pays. Cette stratégie de diplomatie économique lui permet de se prémunir contre un hypothétique chantage chinois et de maintenir un équilibre fragile entre les intérêts divergents des deux superpuissances asiatiques.
En conclusion, les Maldives se trouvent actuellement au cœur d’un jeu complexe d’alliances et de rivalités géopolitiques, où chaque décision politique doit être soigneusement pesée pour préserver l’indépendance et la stabilité de l’archipel. La capacité du président Muizzu à jongler entre les intérêts chinois et indiens démontre l’habileté tactique dont doit faire preuve un petit pays insulaire pour garantir sa survie dans un monde dominé par les grandes puissances.